Maude Bonenfant

Sens, fonction et appropriation du jeu : l'exemple de World of warcraft

Année : 2010

Direction : Charles Perraton

Thèse de doctorat

Lien

Résumé :

Le premier objectif de cette thèse est d'étudier l'exemple archétypal du jeu vidéo World of Warcraft (WoW) (chapitre 1) pour montrer que l'approche classique (chapitre II) est inadéquate par rapport aux nouvelles perspectives sur le jeu (chapitre III) pour faire état de la pluralité des sens produits lors de l'usage du jeu. Les études produites à ce jour sur ce jeu vidéo tendent à le prouver (Corneliussen, Walker Rettberg, Taylor, etc.) : il semble impossible de circonscrire de manière univoque ce que ce jeu signifie pour chacun des joueurs. Il est à la fois une plate-forme ludique, un logiciel de création, un outil de communication et de socialisation, un lieu de travail, un décor pour du jeu de rôle, etc. Pour démontrer la complexité du processus de production de sens d'un jeu tel que WoW, nous nous basons à la fois sur les principaux auteurs sur le jeu issus de l'approche classique (Huizinga, Caillois, Juul) et des nouvelles perspectives (Fink, Henriot, Duflo, Salen et Zimmerman, Malaby) ainsi que sur un cadre théorique sémiologique (Leibniz, Peirce, Eco, etc.) pour distinguer la notion relative de jeu de sa fonction universelle. Alors que la notion de jeu dépend du contexte d'actualisation par un joueur ou un observateur, la fonction se définit par ses conditions de possibilités que nous affirmons être l'espace de liberté encadrée par les règles du jeu : la fonction est le « jeu du jeu », c'est-à-dire l'espace de jeu qui rend possible l'indétermination des actions futures et du sens produit. Le jeu est à la fois produit sous forme de sens (notion) et producteur de sens (fonction). Pour bien marquer ces deux facettes du concept de « jeu », nous élaborons sur la manière dont est produit le sens lors de l'expérience vidéoludique (chapitre IV) et le rôle de l'espace d'appropriation dans l'actualisation du jeu (chapitre V). L'espace d'appropriation est cet espace de liberté plus ou moins restreint que le joueur investit à sa manière. Le sens du jeu étant toujours dépendant de ce qu'en feront les joueurs, nous étudions donc le jeu à travers l'expérience appropriative qui en est faite. Les joueurs s'approprient le jeu, que ce soit en respect ou non des règles, en répétant les occurrences passées ou en créant de nouvelles possibilités (de nouveaux coups, de nouvelles tactiques, de nouvelles actions, etc.). Pour comprendre la spécificité de la fonction de jeu et de l'espace d'appropriation, nous faisons appel aux concepts de réel, actuel, possible et virtuel (Deleuze, Granger, Lévy), la virtualité étant l'élément clé de notre approche pour montrer que le joueur est créateur du sens de son expérience ludique. Ce point de vue immanentiste sur la définition du jeu où le joueur est producteur du jeu entraîne une responsabilisation de la part du joueur dans le sens produit et partagé par la communauté, ce qui suscite une réflexion sur l'éthique (chapitre VI). À partir de la théorie spinoziste, nous proposons alors un modèle pour réfléchir à l'éthique du joueur et à ce que le jeu peut signifier pour l'expérience humaine. L'objectif final de notre thèse est d'évaluer le lien entre la définition du concept de jeu et l'éthique du joueur.

Mots clefs :

jeu, sémiologie, interprétation, éthique, jeu vidéo.